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Virginie Guy

Écrivain privé - Biographe

Le terrible parcours de la procréation médicale assistée

Cet extrait est publié en accord avec la narratrice. Afin de conserver la confidentialité de son récit, les prénoms ont été modifiés.

Mon monde s’est écroulé à l’annonce du diagnostic : j’étais infertile. C’est à ce moment-là que le cauchemar a commencé …

Ma future belle-mère m’a conseillé de consulter en urgence son gynécologue, spécialiste de l’infertilité et de la procréation médicale assistée. J’ai dû alors subir tous les examens de la terre, en premier lieu me faire examiner les ovaires. À partir de ce moment-là, j’ai commencé à remettre le mariage en question. Si je ne concevais pas moi-même de ne pas pouvoir être mère, je ne pouvais pas imaginer que mon futur mari ne puisse être père. J’en étais malheureuse, j’avais expressément dit à Pierre ce que je pensais. J’ai voulu rompre avec lui afin qu’il puisse avoir l’opportunité de connaître la paternité avec une autre femme. C’était une décision difficile à prendre. Quand on vit quelque chose de beau en amour et qu’on apprend cela, ce n’est pas simple de dire « va voir ailleurs et trouve quelqu’un d’autre ». C’était une situation très compliquée à gérer, d’autant plus que c’était à propos d’une raison médicale. Une page de ma vie en rose se tournait.

Même si j’étais la seule concernée par cette problématique d’ovules clairs, donc non fécondables, Pierre a dû lui aussi faire des tests et les résultats ont montré que lui aussi était infertile, ses spermatozoïdes étaient ralentis. Il fumait beaucoup et l’on sait que le tabac ne fait pas bon ménage avec les spermatozoïdes.

Le terrible parcours de la procréation médicale assistée a commencé par ce premier test : le test Hünher destiné à constater la vivacité des spermatozoïdes. Pour cela, il nous a fallu avoir des relations sexuelles un jour précis, à une heure précise, déterminés à l’avance. Nous n’en avions pas vraiment envie et avions alors l’impression de faire l’amour comme des robots, cela n’était pas agréable pour aucun de nous deux. Le lendemain, j’avais rendez-vous chez le gynécologue qui a alors pratiqué un prélèvement, ceci afin d’examiner la qualité et la rapidité des spermatozoïdes à remonter vers l’ovule pour le féconder. Non, seulement ils étaient ralentis par nature, mais, comme j’avais des glaires cervicales très acides et épaisses, leur progression n’était pas satisfaisante. C’est ainsi que le verdict d’une infertilité de part et d’autre a été confirmé. Nous ne pouvions pas avoir d’enfant de manière naturelle.

Nous étions désormais contraints de nous orienter vers la fécondation in vitro. La FIV consiste à mettre un ovule et des spermatozoïdes ensemble pour fécondation de façon naturelle. Nous, nous avons eu la FIV ICSI, qui est différente, encore plus médicalisée. Dans ce cas, c’est un biologiste qui, à l’aide d’une pipette, introduit un spermatozoïde directement dans l’ovule pour fécondation. C’était la partie la moins désagréable.

Car avant d’en arriver là, le processus a été long et douloureux moralement. L’objectif du traitement de fond étant d’activer l’ovulation, je me suis donc injectée un traitement, tous les jours, pendant deux semaines. La première semaine, on a envie de commettre un meurtre ! Pour être franche, j’ai vécu pendant ces premiers jours une période que j’aimerais bien oublier. Mais, malheureusement on n’oublie pas ce genre de choses. Le traitement jouait sur les hormones bien-sûr, donc sur le caractère, sur les humeurs. J’avais totalement perdu patience, j’étais devenue tellement exécrable que j’ai fait pleurer des collègues de travail, à tel point que j’aurais pu tuer quelqu’un. Normalement une femme ovule une fois par mois, un ovule à la fois. Le produit que je m’injectais surstimulait mes ovaires afin de produire vingt à trente ovules. Bien sûr que le comportement d’une femme change pendant cette période-là. Et que dire de la prise de poids ? Au cours de ma première FIV, en juin 2008, quelques temps avant notre mariage, j’ai pris huit kilos en deux semaines ! C’est une évidence que je ne rentrais plus dans ma robe de mariée, j’ai été si contrariée de devoir la faire retoucher par deux fois. Cette anecdote me fait sourire aujourd’hui car je ne rentre toujours pas dedans. Exécrable au bureau mais aussi exécrable à la maison avec Pierre. J’avais des envies de meurtre, cela m’a marquée pour toujours. Le protocole de FIV s’est poursuivi par des contrôles sanguins réguliers pour vérifier la bonne stimulation de mes ovaires. Dès que les résultats ont montré que les conditions étaient rassemblées, j’ai subi des prélèvements utérins sous anesthésie générale. Malgré le cauchemar de la période de stimulation, j’avais été très fertile selon le gynécologue : vingt ovules, j’avais produit vingt ovules ! Seuls six d’entre eux étaient bons à garder dont quatre ont été congelés. L’étape de la fécondation a été assurée par le biologiste qui a inséminé un ovule avec les spermatozoïdes prélevés chez mon futur mari. Une fois la division cellulaire commencée, l’ovule m’a été transplanté de retour par voies basses pour nidification. Par la suite, l’idéal est de pouvoir rester au repos en attendant la confirmation de grossesse.

J’ai fait quatre FIV en suivant ce protocole. Pour les trois premières, j’ai repris le travail tout de suite. J’étais cadre dans une entreprise et mon un poste était très stressant. Dans ces trois cas-là, la nidification n’a pas pris. Et là encore, c’était une situation très difficile à vivre, il fallait passer par là. J’ai, à chaque fois, ressenti les symptômes d’un début de grossesse : mes seins avaient grossi, étaient douloureux, j’étais nauséeuse, j’avais des douleurs dans le bas du ventre… mais les bilans sanguins, deux semaines plus tard, restaient négatifs. J’ai pensé à des grossesses nerveuses. C’est plus dur à vivre que toutes les injections de la terre que j’avais eues ! À chaque fois, il y avait cette épée de Damoclès au-dessus de ma tête : « il n’en reste plus que deux ; il n’en reste plus qu’une » comptais-je. En France, la sécurité sociale autorise le remboursement de quatre FIV, donc si aucune grossesse ne se déclare il n’y a plus d’autre recours, ce qui ajoute une dose de stress. Bien sûr que l’on peut continuer le protocole au-delà des quatre FIV prises en charge, mais le coût est trop exorbitant pour avoir la chance d’être mère ; coût financier et coût psychologique.

Pour ma quatrième et dernière FIV, mon employeur m’a mise en repos compensateur. J’avais l’équivalent de deux mois de travail à récupérer, c’était illégal. J’ai pu alors rester à la maison, tranquille et, cette fois-là, la grossesse a pris. Et dire que je m’étais trompée dans les piqûres de stimulation, j’avais fait la première injection trop tôt dans mon cycle et au moment du prélèvement, je n’avais presque pas d’ovule. J’étais persuadée d’un nouvel échec.

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