Pourquoi suis-je devenue écrivain biographe ?
Passionnée par les contacts humains, la lecture et l’écriture, l’idée d’embrasser cette carrière ne m’est pas venue naturellement. Ni mes études linguistiques, ni mon parcours professionnel ne me prédestinaient à ce métier passionnant. Mais une vie professionnelle foisonnante et variée, une grande ouverture d’esprit et une adaptabilité à des mondes différents m’y ont tout doucement menée.
Alors comment en suis-je arrivée là ?
À l’âge de dix-neuf ans, j’ai répondu à l’appel d’aller prendre le large, ce qui semble être une évidence pour tout breton qui se respecte. J’ai choisi de partir vivre, étudier et travailler à l’étranger : en Allemagne puis en Angleterre. À mon retour en France, je me suis installée dans la région des Châteaux de La Loire où j’ai vécu vingt-cinq ans. En 2018, j’ai décidé de revenir dans ma Bretagne natale ; un retour aux sources auquel j’étais très attachée.
Mes passions se retrouvent dans ma profession de guide-interprète : L’Histoire et les Arts, et j’affectionne particulièrement les beaux livres. Quelle délectation ressentais-je quand, au cours de mes visites guidées dans les monuments majestueux des Châteaux de la Loire, je m’autorisais à faire de discrètes distorsions à la grande Histoire et y glisser de petites anecdotes locales. Les touristes en étaient friands. En vérité, depuis mon enfance, je suis fascinée par les souvenirs et les mémoires que chacun se plait à évoquer lors des grandes réunions familiales. Plus tard, les histoires que je découvrais dans les livres me faisaient rêver. Belles ou tristes, les tranches de vies me passionnaient déjà. Aujourd’hui, mes lectures se nourrissent de romans historiques, de sagas familiales, de romans du terroir, de biographies.
Un incident de parcours de vie en 2010 m’a contrainte à une reconversion professionnelle et j’ai choisi d’exercer le métier d’aide-soignante à domicile. Pendant plus de dix ans, j’ai pris soin de personnes en perte d’autonomie due au fait de la vieillesse ou du handicap. J’aimais particulièrement le relationnel avec les patients dans leur environnement, à leur image ; celui qui nous raconte leur quotidien, leur vie. Ces conditions de proximité créaient des liens. J’ai connu d’émouvants moments de confidences ; des secrets que mes patients me révélaient et dont ils n’avaient parfois jamais osé parler à leur famille. De ces instants suspendus dans leur mémoire, entre partage et soulagement, j’en ai retiré une véritable prise de conscience de l'importance de ces souvenirs qui m’étaient dévoilés. Combien le fait de les évoquer, de les raconter librement pouvait émouvoir, voire alléger ces personnes d’un poids vieux de plusieurs années. De mon côté, je considérais que les écouter était un autre soin très précieux que je leur apportais. Et je me posais toujours cette question qui me taraudait : comment maintenir ces confidences en vie ? Et ne pas les laisser partir dans l’oubli… La silhouette de l’écrivain biographe se profilait à l’horizon.
Le goût des rencontres Ma vie m’a offert cette chance de voyager en France et dans le monde. J’ai eu le bonheur de découvrir différentes cultures, histoires, coutumes. Sociable, ouverte d’esprit et curieuse, j’ai ainsi vécu de riches et intéressantes rencontres parfois même improbables et pour moi, encore aujourd’hui, inoubliables. Des inconnus qui, le temps d’une promenade dans un parc, d’un café en terrasse, d’un voyage en train, d’un séjour en hôpital, m’ont accompagnée quelques heures et se sont racontés. Des moments de leur vie, parfois agréables, parfois difficiles, que j’écoutais avec attention et intérêt. Sensible à ces récits, j’étais heureuse de ces rencontres, de ces partages. Là encore je prenais conscience que toute vie est riche à raconter. En même temps je ressentais la déception que tout ce qui se dit à l’oral se perd. Au gré de mes prises de conscience, j’étais animée par une irrésistible envie d’écrire les témoignages que je recevais, de les poser en mots sur le papier afin de laisser une trace de ces récits.
Une première expérience de récriture de mémoires pour un oncle a déclenché ma décision de me reconvertir à nouveau. C’est ainsi que je me suis formée au métier d’écrivain biographe afin d’accomplir une nouvelle mission : prendre soin des gens, de leurs mémoires en prenant soin de leur récit : écrire le livre de leur vie.
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